Tout le monde connait Frank Sinatra Ol’ Blue Eyes, le grand crooner du XXe siècle, mais beaucoup ne connaissent pas toujours Carlos Gardel. Question de génération et de diffusion sans doute.
“Sos Gardel ! ” littéralement ‘tu es Gardel’ est une expression en Argentine pour dire de quelqu’un qu’il a fait quelque chose d’extraordinaire, d’inhabituel et de remarquable.
Carlos Gardel, comme Maradona et Evita, est une idole incontestée du peuple argentin. Mais qui était Gardel ? Né le 11 décembre 1890 ou 1887 et mort à Medellin en Colombie le 24 juin 1935 dans un accident d’avion. Il était un chanteur, acteur et compositeur, le personnage le plus important dans l’histoire du tango.
Carlos Gardel, surnommé “La Grive créole” était baryton, avec une extension de deux octaves et une capacité de coffre de 7 litres, ce qui lui aurait permis de devenir un chanteur d’opéra comme lui a proposé Enrico Caruso. Ses cordes vocales étaient comparables à celle de Caruso, Callas et Sinatra.
Depuis le 1er Septembre 2003, la voix de Carlos Gardel fait partie du patrimoine mondial de l’UNESCO au même titre que les manuscrits originaux de la Neuvième Symphonie de Beethoven.
Mais qu’est-ce que Gardel a à voir avec Sinatra?
Lorsque Carlos Gardel est en tournage à New York en 1934 pour la Paramount – ce sera le film Tango à Broadway pour lequel il avait eu recours aux services d’un jeune bandoneoniste Astor Piazzola, il chante tous les soirs à 21h à la radio National Broadcasting Corporation (NBC) avec l’orchestre de Richard Hommer et est annoncé comme le ” baryton argentin”. Un de ces soirs, un gamin du quartier Hoboken de New Jersey qui s’appelle Francesco Albertino Sinatra vient assister à sa représentation, poussé par sa petite amie Nancy Barbato qui deviendra sa première épouse en 1939. Il a 18 ans et après avoir été renvoyé de l’école il a fait plusieurs petits métiers, comme camionneurs, livreur de journaux, etc…et il a toujours fini licencié pour faute.
Sinatra a été impressionné par la voix du ‘Zorzal argentino’ et quand la représentation pris fin il est allé timidement le saluer comme cela se faisait naturellement. Quelques mots en italien et en espagnol pour entrer dans la conversation. Lorsque Gardel lui demande ce qu’il fait dans la vie, Nancy s’empresse alors de répondre et dire de Frank qu’il perd son temps car il chante très bien, mais au lieu d’éduquer sa voix il traine toujours avec des bandits, ce qui lui a coûté plus d’une fois de visiter les postes de police.
Gardel met alors sa main sur son épaule et lui dit :
“Regarde ragazzino, quand j’avais ton âge, j’étais à Buenos Aires comme toi maintenant à New York. Je passais mes journées avec des gens peu recommandables du côté du marché d’Abasto. Surtout avec des mécréants Génois, la fratelli des Traverso, dont le père tenait une auberge appelée O’Rondeman et qui était un repaire de la Mano Negra, la Camorra et tutti quanti. Avec ça, je terminais souvent mes journées au commissariat. Je ne vais pas dire que je suis maintenant un saint, mais le chant ne m’a pas seulement donné la gloire et la fortune, il m’a aussi éloigné de cet environnement où ‘aurais pu terminais par pourrir en prison ou mourir violemment”.
Sinatra ose demander: “Monsieur Gardel , qu’est-ce que vous me conseillez de faire alors ?” .
Gardel lui répondit :” Pour l’instant ragazzino, profites d’être ici pour t’inscrire au concours de chant de la radio qui doit s’appeler Major Bowes Amateur Hour. Fais-le ragazzino tu n’as rien à perdre à essayer ”
Sinatra se présente et accompagne le trio “Three Flashes ” qui s’appelait ” Hoboken Four” pour cet événement. Ils remportent le premier prix qui est une tournée un tour financée par la station de radio.
Longtemps après, Frank Sinatra est venu pour la première et unique fois en Argentine en août 1981. Il s’est présenté au Luna Park à Buenos Aires devant 20 000 personnes. Selon le journal “La Voz” il aurait dit que son spectacle au Luna Park est l’un des meilleurs spectacles qu’il aurait fait. ” Cela m’a donné la chair de poule” aurait-il déclaré.
Pourquoi tant de reconnaissance pour le public argentin et tant d’émotion après 40 ans de tour de chant? Peu de gens savaient que la veille, il s’était rendu incognito au quartier de l’Abasto, le quartier de la jeunesse de Carlos Gardel. Il a demandé à l’attaché culturel de l’ambassade des États-Unis de l’accompagner et de localiser le café O’Rondeman. Cela l’a amené à l’angle des rues Aguero et Humahuaca, où subsistait alors un terrain vague entre les anciennes fondations du célèbre café.
Sinatra a alors tiré de son manteau un ticket jaunit d’une émission de radio de 1934, l’embrassa et le mit en terre à l’étonnement des personnes présentes, il aurait alors dit « Thanks for helping me to live, Mister Gardel ».
Une belle anecdote qui alimente un peu plus la légende de Carlos Gardel si cher aux Porteños.
Ecrire un commentaire