Mario Zavattaro (1876-1932), professionnel de lutte gréco-romaine et illustrateur reconnu dans l’Argentine des années 1900 est un personnage hautement symbolique de la bohême portègne.
Artiste, sportif, ses deux spécialités conjuguées à une âme d’enfant, résume parfaitement la personnalité de Zavattaro.
Né à Naples en 1876, il s’embarque à l’âge de 23 ans pour rejoindre des horizons remplis d’espérances.
Dans les premières années des sa vie à Buenos Aires, Zavattaro gagne son pain comme lutteur professionnel. Et à partir de 1901, il devient illustrateur permanent pour la revue Caras & Caretas, un hebdomadaire humoristique et satirique de son temps en Argentine.
Un corps herculéen qui n’a d’égal que la finesse de sa fibre artistique, l’œil vif au service de la joute physique et artistique, il participe à l’âge d’or de cette revue comme illustrateur et caricaturiste.
“Caras & Caretas” qui peut se traduire littéralement par “Visages & Masques” a connu son apogée dans une époque où Buenos Aires connaissaient une forte expansion. Accroissement notable de la population, première capitale économique d’Amérique du Sud, centre culturel important, attractive et resplendissante, le tango naissant… la revue atteignit dans cette période jusqu’à 100 000 exemplaires vendus chaque semaine. Son objectif était de livrer chaque semaine un numéro impeccable et irréprochable dans sa ligne éditoriale auquel de grand noms de l’écriture nationale et internationale ont signé des articles dans cette revue à succès.
Son genre novateur a influencé l’apparition de nombreuses revues de ce style à l’instar de “El Gladiador” auquel Zavattaro a aussi participé.
Œuvrant chaque semaine à dessiner une couverture devenue emblématique, sa signature devint rapidement un symbole de Caras & Caretas.
Quand ses collègues lui demandaient ce qu’il préférait, dessiner ou lutter, Zavattaro répondait dans un large sourire “euh…en réalité je préfère la lutte”. Et pourquoi donc? s’en étonnait son interlocuteur, “Parce qu’à la lutte les applaudissements s’entendent plus fort”.
Devenu ex-lutteur professionnel de renommée nationale, il consacra à sa discipline de prédilection ses connaissances dans les règles et son honnêteté comme juge-arbitre.
Ses collègues d’aventure le reconnaissaient comme un romantique, un mousquetaire semblable au géant Porthos. “Un Porthos délicat, intrépide, noble et artiste” comme l’a exprimé l’un de ses amis lors de ses obsèques.
Le talent de Zavattaro est apprécié et recherché par le monde de l’édition. Il participe à de nombreuses reprises comme dessinateur pour les grands quotidiens nationaux Critica et la Nacion.
Il sera également mis à contribution pour dessiner les couvertures d’auteurs aussi connus que Leopoldo Lugones, Horacio Quiroga et Carlos de la Púa.
L’œuvre la plus fameuse de Mario Zavattaro est d’avoir illustré la plus belle édition du Martin Fierro publié dans les fameux almanachs Alpargatas.
Martin Fierro de José Hernandez est une ode à l’Argentine des gauchos.
L’almanach de l’usine Alpargatas est connu pour ses œuvres exclusives d’artistes illustres comme l’a été à la suite de Zavattaro, Florencio Molina Campos. Ces almanachs Alpargatas sont aujourd’hui très recherchés par les collectionneurs.
Les 36 aquarelles qui illustrent chaque poème de l’œuvre de José Hernandez résument à elles seules les capacités de l’artiste à se distinguer comme dessinateur, illustrateur et peintre.
L’aquarelle apporte à l’œuvre de la fraicheur et son succès fut tel qu’il s’en vendit 40000 exemplaires à chaque série, et ce pendant trois années consécutives.
Ce ne sont pas seulement des peintures remarquables sinon un grand hommage rendu par l’artiste génois à sa patrie d’adoption.
Le crise de 1929 arrivant, les personnes de son milieu se sont retrouvés rapidement sans travail. Seul, malade, et sans possibilités de subvenir à ses besoins, il s’éteint en 1932 dans une Argentine alors en proie au désarroi.
Mario Zavattaro est malheureusement aujourd’hui oublié même si n’importe quel argentin connait ces illustrations sans toutefois connaitre le nom de l’auteur. Ses aquarelles originales seraient introuvables mais il n’en demeure pas moins que son trait original se reconnait entre tous.
Son expression artistique et ses œuvres sont souvent comparés à celle de son contemporain nord-américain Norman Rockwell. Sans aucun doute le plus bel hommage qui peut lui être rendu en comparaison à la longévité de ce dernier.
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