Emeric E. Vidal > marin anglais et peintre de l’Argentine


Emeric Essex Vidal (1791-1861) était avant tout un marin anglais embarqué depuis son plus jeune âge au service de sa Majesté. Peintre autodidacte, il n’a cessé de coucher sur le papier ses observations oculaires des pays, ports et régions traversées. Attaché à représenter les locaux dans leur environnement naturel, ses peintures nous emmène à la rencontre de la vie à Buenos Ayres lors de ses deux années passées entre 1816 et 1818.

Le contexte historique

La marine britannique chargée de contrôler l’Atlantique Sud est basée à Rio de Janeiro. Elle possède alors la domination des mers et des routes maritimes et elle est chargée de veiller aux intérêts économiques de la couronne anglaise. Buenos Aires et la région du Rio de la Plata vit alors les convulsions qui succèdent à sa libération de la tutelle espagnole (mai 1810) et déclare son indépendance en juillet 1816. Les portugais en profitent pour essayer de s’accaparer la rive Est du Rio de la Plata (l’actuelle Uruguay).
En sa qualité de marin, Emeric Essex Vidal est à ce moment officier dont la fonction est secrétaire de l’amiral et comptable sur le H.M.S Hyacinth, un bâtiment chargé de jeter l’ancre dans les ports de Montevideo et de Buenos Ayres.
Les 31 mois passés dans ces parages lui donneront le loisir de se promener dans les rues de Buenos Ayres jusqu’aux abords de l’immense Pampa qui s’offrait à son regard. Il y croise à la fois des gauchos, des indiens Pampas et des européens et criollos (fils d’immigrés espagnol nait sur le sol américain).

Marin et peintre,Emeric E. Vidal se convertit en documentaliste.

En plus de son talent d’aquarelliste amateur, ses peintures revêtent une grande valeur documentaire. Il nous place en spectateur de ses propres observations:

  • Toutes les informations contenues dans ses peintures se basent sur ses observations personnelles
  • Il y est décrit tout ce qui lui parait surprenant et exotique
  • Eut égard à la situation, on ne détecte aucun préjugés politiques
  • Elles sont destinées à un public intéressé de connaitre les réalités sud-américaines.

Ses dessins, illustrations et peintures sont une œuvre pionnière étant donné que jusqu’ici il n’existait pratiquement pas de représentations de ce type des rives du Rio de la Plata.

Il y a un avant et un après Emeric E. Vidal.

Car en effet, à part Fernando Brambila qui participait alors à une vaste expédition espagnole entre 1789 et 1794 chargée de parcourir les colonies d’Amérique du Sud et dont les archives sauvées in-extremis. Brambila nous a laissé quelques vues de l’Argentine (notamment une vue de Buenos Ayres depuis la rive au Sud de la ville datant de 1794 et un paysage de la cordillère des Andes sur le chemin du Chili), aucun n’avait aussi bien représenté qu’Emeric E. Vidal. Et ce n’est qu’après lui que les premiers peintres locaux apparaitront comme Carlos Morel et Fernando García del Molino à partir de 1830. Puis viendra le temps des peintres français de la deuxième moitié du XIXe siècle qui agrandiront la collection.

A la fin de l’année 1818, il est de retour à Londres et rentre en contact avec un fameux éditeur de la place, Rudolf Ackermann, Celui-ci le commissionne à la préparation d’un livre illustré de ses aquarelles qui allait décrire les paysages, les coutumes, les hommes et les habitudes des villes de Buenos Ayres et de Montevideo.
Le livre a été édité à 800 exemplaires en 1820 sous forme de 6 cahiers comprenant une sélection de 24 aquarelles et sous le titre de Picturesque Illustrations of Buenos Ayres and Montevideo.
Il connut un fort succès et lui valut d’être souvent recopié par d’autres éditeurs. Étonnamment, ce n’est que depuis 1923 que ce livre fût connu en Argentine.

L’héritage illustré de Emeric E. Vidal

Plus tard, des auteurs ont repris un certain nombre d’aquarelles de Vidal pour illustrer des éditions thématiques sur l’histoire de Buenos Aires. Notamment l’historien argentin Bonifacio del Carril qui est l’auteur de nombreux ouvrages sur les traditions historiques avec par exemple Corrida de toros en Buenos Aires (1959), Monumenta Iconographica: Paisajes, ciudades, tipos, usos y costumbres de la Argentina 1536-1860 (1964), Iconografía de Buenos Aires (1982) et Gauchos(1993).

Illustration du haut: Le fort de Buenos Aires – septembre 1816
Cette aquarelle a été réalisée quelques mois après la déclaration d’indépendance du 09 juillet 1816. C’est historiquement la première représentation du drapeau argentin.

Ci-dessous: Corrida de toros à Buenos Aires
La plaza de toros était située sur l’actuelle Plaza San Martin.

Ci-dessous: Chasse à l’autruche dans la pampa
Emeric E. Vidal n’hésite pas à s’éloigner de la ville pour aller observer la campagne et connaitre les vertiges de l’horizon infini de la pampa. Il y observe cette scène de chasse à l’autruche aux boleadoras

Ci-dessous: Le marché indien
L’auteur décrit un quartier de Buenos Aires que les habitants appellent le marché indien et qui se situait au sud de la calle la Torres (actuelle Rivadavia). Ils viennent troquer les peaux de yaguareté et leurs confections de ponchos, cuirs tressés, plumeaux contre quelques aliments, mate, sucre et alcool.

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