L’actuel Ambassadeur de France en Argentine, Jean-Pierre Asvazadourian, dresse un portrait décomplexé de l’Argentine et des relations historiques qui unissent les deux pays.
Des liens étroits existent notamment sur le plan intellectuel et culturel puisque les relations politiques et économiques ont souvent été tendues au cours de sa jeune existence.
A l’heure ou l’Argentine est citée comme modèle pour répondre à la crise qui agite les pays du vieux continent, et particulièrement ceux qui ont “fait” l’Argentine, ce texte intitulé “L’Argentine, l’autre Grand d’Amérique du Sud” révèle les multiples aspects et la complexité d’un pays vu sous un grand angle.
Morceaux choisis (paru dans Mondes n°6, les cahiers du Quai d’Orsay):
Des relations franco-argentine, son inspiration
La relation franco-argentine est aussi ancienne que l’Argentine elle-même, qui a puisé dans la pensée française du siècle des Lumières les idées qui la conduiront à s’émanciper de la Couronne espagnole. José de San Martin, le Libertador, père de la nation argentine et artisan, aux côtés de Simon Bolivar, des indépendances sud-américaines, a vécu plus de temps en France, la « seconde patrie » où il est décédé, que sur le continent américain. Les grandes figures de la jeune République argentine connaissaient et admiraient la France, ses penseurs et ses réalisations
Georges Clemenceau entreprend en 1910 ce voyage sud-américain pour une série de conférences, mais également en tant que correspondant de L’Illustration.
Publiées en 1911, ses notes de voyage sont un témoignage vivant de l’Argentine, qui célèbre alors fastueusement le centième anniversaire de la révolution de Mai.
Or, cent ans plus tard, alors que l’Argentine vient de célébrer, l’an passé, le bicentenaire de sa révolution, on peut douter que la perspicacité de Clémenceau lui aurait permis de deviner le cours complexe de l’Histoire et du développement économique qu’allait connaître ce pays après les « années dorées » de la période 1880-1930, la Belle Époque dont la nostalgie a laissé une empreinte profonde dans l’identité argentine.
Située dans un autre hémisphère, aux confins d’un autre continent, l’Argentine est certes géographiquement bien loin de l’Europe, mais elle se trouve arrimée à celle-ci par les liens étroits de l’immigration (dont Candide fut le symbolique précurseur) ainsi que par ceux de la pensée et de la culture ce pays qui, il y a un siècle était déjà une puissance émergée, échappe aux définitions simples ; loin d’être linéaire, son parcours suit, en effet, les méandres et les impasses d’un labyrinthe, la figure fétiche du plus emblématique, du plus raffiné et du plus mystérieux des écrivains argentins, Jorge Luis Borges
L’Argentine et ses ressources
Les premiers atouts de l’Argentine sont évidemment sa géographie et ses ressources naturelles.
8e pays au monde par sa superficie (après l’Inde) pour une population de 40 millions d’habitants, l’Argentine appartient au groupe des 10 pays les mieux dotés en ressources naturelles ; avec le Canada et l’Australie, elle est en outre à la tête des États disposant en ce domaine de la plus grande richesse par habitant. La diversité et l’ampleur de ses ressources sont à la mesure d’une géographie qui se déploie depuis le tropique du Capricorne jusqu’à la Terre de Feu et à l’Antarctique (dont l’Argentine est l’un des États possessionnés et où elle entretient 7 bases scientifiques permanentes), le long d’un littoral de plus de 5 000 km
Buenos Aires, une capitale culturelle et intellectuelle
Buenos Aires (où vit le tiers de la population argentine) est sans conteste l’une des capitales les plus brillantes du continent américain. La vivacité du débat d’idées, la richesse et la diversité du monde intellectuel, ainsi que son cosmopolitisme, l’ampleur de la production littéraire et artistique, le nombre de théâtres (autant qu’à Londres et à New York), la vitalité de l’industrie cinématographique et audiovisuelle alimentent le rayonnement de la cité et son attractivité touristique croissante. Buenos Aires a été désignée cette année « Capitale mondiale du livre » par l’UNESCO.
Quant au tango, l’un des éléments les plus emblématiques de la sensibilité et du brassage portègne, il a été inscrit en 2009 sur la Liste du patrimoine immatériel de l’humanité