Le navigateur suisse Yvan Bourgnon et son coéquipier Sébastien Roubinet ont quitté Ushuaïa (Argentine) mardi dans un catamaran de sport de 6 mètres de long (un Nacra F20) pour un tour du cap Horn, un raid de 3 jours au sud du continent américain, a annoncé son équipe technique.
Baptisée «Défi Terrésens Cap Horn», cette expédition dans l’une des zones de navigation les plus périlleuses du globe, est «un projet un peu fou», avait confié Bourgnon en décembre dernier. «Mais je n’ai jamais passé le cap Horn et il était temps que je fasse quelque chose!», avait-il ajouté au cours de cet entretien.
Bourgnon, 40 ans, est un récidiviste de ce genre d’aventures, vivement déconseillées au commun des mortels. En septembre 2010, il avait traversé la Méditerranée avec Jérémie Lagarrigue, reliant Marseille à Carthage (Tunisie) en 53 heures et 52 minutes sur un engin du même type, conçu pour régater dans des eaux abritées.
Cette fois, Bourgnon et Robinet – un spécialiste des expéditions polaires- veulent accomplir une boucle Ushuaïa/Ushuaïa de 450 milles/810 km (théoriques), via le canal de Beagle, la baie Cook et la poussière d’îles qui débordent le continent sud-américain. Une “ballade” de trois jours sans assistance, avec passage dans le Pacifique et retour par l’Atlantique, une fois passé le Horn de sinistre réputation.
Source: AFP – Ouest-France.fr
Jour 1 – 17 janvier: départ d’Ushuaia à 04H00 (heure locale) et descente du Canal Beagle vers le Pacifique
Jour 2 – 18 janvier: route Ouest-Est, passage du Cap Horn à 22h00
Jour 3 – 19 janvier: Baie Nassau, Canal Beagle et retour à Ushuaia
Communication téléphonique (satellite) avec l’AFP pendant:
Une fois passé le cap Horn, les deux hommes se sont accordé quelques heures de repos, au mouillage dans une baie abritée.
Nous sommes à l’abri dans une baie à l’est du cap Horn, a expliqué Bourgnon.
Nous avons passé le cap vers 02h00 du matin (heure française). Tout est OK mais qu’est-ce que ça caille!
Les conditions de navigation dans le Pacifique ont été “très difficiles”, des vents de 45 nœuds (85 km/heure) et des creux de 6 mètres. Le plus dur a été la tension nerveuse et le froid.
A un moment donné, nous n’avions plus que 4 mètres carrés de voile mais nous marchions quand même à 15 nœuds, a indiqué le navigateur suisse. C’était démentiel!
La navigation dans le Canal de Beagle, au début de leur parcours, avait été laborieuse en raison de vents moins forts que prévu. Nous sommes arrivés au cap Horn 6 à 8 heures plus tard que ce que nous avions programmé. On a dû faire avec…
Nous n’avons pas chaviré. Notre seul problème technique a été avec la grand-voile qui sortait du mât. On a dû s’arrêter dans le Canal de Beagle pour monter dans le mât et réparer. Mais sinon, le bateau est OK.
Premiers entretiens après l’exploit:
60h de bonheur, de tensions, de descentes de pistes noirs, de baston, de pétole, de doutes, d’images hallucinantes… De loin le plus fou de mes navigations… Merci Seb, sans toi on ne serait pas rentre a la maison… On a savoure ce moment dans le silence pour l’éternité…on est détruit mais conquit d’un bien être merveilleux.
C’est le truc le plus dur que j’ai fait: Tous les dangers étaient réunis, une bonne dose de folie.
Les deux hommes ont vécu engoncés dans leurs combinaisons étanches, dormant par bribes de quelques minutes sur un trampoline noyé sous les embruns.
C’était hostile, exceptionnel. A la sortie du Canal de Beagle, en entrant dans le Pacifique, nous avons navigué avec des centaines de baleines. C’était magique!
Le moment le plus dur a été le “run” d’une douzaine d’heures dans le Pacifique. La mer était pourrie. Nous risquions d’être éjectés à tout moment. On s’accrochait, concentrés pour éviter de chavirer. On essayait de freiner le bateau…
Après le cap Horn, le vent est monté à 50 nœuds (près de 90 km/heure).
Nous partions en sur-vitesse sur les vagues, c’était surréaliste. Nous avons plusieurs fois frôlé la catastrophe. Il a fallu quasiment tout affaler mais on marchait encore à 15 nœuds.
Pendant une heure et demie, on ne s’est plus parlé. On ne faisait pas les malins. Nous savions que nous ne pouvions compter que sur nous-mêmes dans une mer où la durée de vie est de deux heures!
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